Intention, mise en scène
A la lecture du texte d’Octave Mirbeau, il m’est apparut évident que la force des images et des descriptions ne pouvaient pas être illustrée par une mise en scène trop réaliste car ce texte donne déjà énormément à voir. La force cinématographique du texte m’a inspiré la sobriété dans mes choix scénographiques. C’est la raison pour laquelle, s’est imposé une formule donnant à la comédienne une ligne de mise en scène aussi simple qu’ambitieuse : « Un auteur, une comédienne, un objet, une lumière ».
Toujours dans un souci de simplicité et d’authenticité, Karine Ventalon et moi-même sommes partis d’un seul objet pouvant accompagner Célestine : sa malle.
Cette malle deviendra tour à tour un lit, une chaise, au autel, un cercueil, une personne, un lavoir, une table, un comptoir, un mur derrière lequel on se cache. De cette malle sortiront les quelques rares objets que Célestine a conservés de ses années de chambrière.
Grâce à ce parti pris, le spectateur est placé dans le rôle de celui qui doit faire le lien, celui qui doit inventer, ressentir, voyager, être en « route ». Célestine est un personnage « nomade » et nous nous déplaçons avec elle à travers les différentes places où elle a travaillé.
La sobriété des mouvements et des déplacements de Célestine renforce notre volonté d’étalonner le travail théâtral sur la tension et l’intensité de l’interprétation plus que sur l’explication du texte. La comédienne redonne vie au passé de son personnage comme si tout se passait au présent, devant nous, maintenant de façon symbolique mais organique.
Il n’y a aucun changement d’éclairage, là encore, la comédienne et la mise en scène créent des atmosphères multiples aux rythmes de déplacements chorégraphiés et précis. L’enfermement de Célestine est mis en balance en permanence avec son envie de liberté et d’affranchissement. Sa prison devient quasi mentale à la relecture, devant nous, de son journal.
L’idée maîtresse est de faire surgir la vie à travers les souvenirs enfouis, la liberté dans un univers où tout est contrôlé et réglementé et enfin la parole dans un monde où tout doit se taire et où seules les apparences comptent.
Comme elle se replonge dans les événements de son passé à travers les écrits de son journal intime, Célestine s’adresse aux spectateurs sans retenue ni pudeur ce qui donne d’autant plus de violence à ses propos. Le spectateur est tour à tour complice, confident, témoin, voyeur, accusé, juge pour son plus grand plaisir.