Elle dégage de son apparence, son allure, son identité un souffle de liberté. Un coté sans-filtre doublé d'une empathie permanente. Ne pas compter sur elle pour user d'une quelconque posture. Son naturel prend à chaque fois le dessus. « Sapristi ! C'est incroyable... ». Ce sont ses mots spontanés, le 15 décembre 2018 en direct du Zénith de Lille, au moment de son sacre à l'élection Miss France. Vaimalama Chaves est alors la cinquième Miss Tahiti à endosser la fameuse écharpe. Quelques mois auparavant, cette diplômée en management s'activait encore comme Community Manager dans une salle de sport à Papeete.
D'elle, il faut savoir l'enfance espiègle et gentiment dissipée, les railleries perpétuelles subies à l'adolescence au sujet de son physique, l'engouement pour le surf. Et une passion constante pour la musique. « Cela fait partie de notre culture, à l’école, tous les matins, après la prière on chantait. A la maison, ma mère écoutait des chanteuses à voix comme Mariah Carey ou Céline Dion. Mais le titre qui passait en boucle, c'était Greatest Love of All de Whitney Houston ».
Il y a des souvenirs prégnants liés à ce qu'on appelle la bringue tahitienne. Un rendez-vous, un rite.
Une fièvre sous le signe de la complicité amicale et sur fond de chants tropicales et insulaires. Il y aussi, alors qu'elle est au collège, un vrai coup de cœur pour le morceau de Tom Frager Lady Melody. « A partir de là, j'ai demandé à mon oncle de m'apprendre à jouer de la guitare. Il m'a enseigné les premiers accords avec lesquels je pouvais enfin jouer plusieurs chansons. Le reste de mon apprentissage, je suis allée le faire sur internet. »
Elle dit aimer l'électro, cite Fakear ou Bayonne mais aussi la folk énergique d'un Matt Hood. Elle dit surtout n'être réfractaire à aucun genre et se balade partout « tant que la musique est bonne ». Ses ami(e)s l'appellent Vai. Elle peut se multiplier, toucher à tout (elle sera l'année prochaine à l'affiche du téléfilm Meurtre à Tahiti), mais garde le secret des lenteurs océanes.
Chez cette jeune fille de 25 ans, une façon gourmande d'embrasser le présent. Elle n'est en demande de rien, constat qui vaut autant pour sa participation à l'élection Miss France que pour cet album. La compétition, ce n'est pas dans son ADN. Elle saisit au vol ce qu'on lui offre, mesurant dans le même élan sa chance et sa bonne étoile. On l'aura vue chanter, armée de son fidèle ukulélé ou d'une guitare, sur les plateaux de Yann Barthes et Cyril Hanouna. « Si je ne me mets pas à chanter, mes proches savent que je ne vais pas bien. »
Ce disque est à son image : vibrionnant, alerte, ouvert à tous les vents, accueillant. Un équilibre parfait entre reprises et chansons originales. Au fil des titres, Vai papillonne, l'âme volatile, offre sa malice au tube imparable de Jeanette (Porque te vas), apporte une touche sensuelle à Colore, rend un élégant hommage au regretté Nilda Fernandez (Nos fiançailles), accouche d'une fluidité vibrante sur La vie en rose et s'empare de Jardin d'hiver en clin d’œil à la version du groupe polynésien Pepena. Ces chansons-là, elle les traverse, les étreint. Le ukulélé omniprésent sur l'ensemble du disque - donne l'impulsion à J'ai demandé à la lune. Ce qui frappe surtout, c'est la douceur et le magnétisme d'une voix aussi singulière que solaire, touchante par son accent et cette délicieuse particularité à enrouler les « r ». Parce que Vai chante comme elle respire, sans tricher. Autour d'elle, Jok'a'Face - moitié du duo électro-pop The City - et Corson à la réalisation ainsi que Jan Pham Hui Trui, guitariste pour Calogero, l'auteur Yohann Mallory (Johnny Hallyday, Louane, Jenifer…) ou encore les compositeurs Tristan Salvati (Angèle, Marina Kaye…), Renaud Rebillaud (Slimane, Gims…). Des chansons pop accrocheuses et immédiates (Ton nom déjà, On est d'amour), d'autres pleines de saveur et d'allant (Construis-moi, J'apprendrai), des incursions mélancoliques (Ce temps qu'on perd).
Vaimalama Chaves se refait une beauté musicale. Et son chant a le réconfort d'une caresse.