C'est un rayon de soleil sur une pop qui voit loin, au-delà des clivages et des effets de manche. A 29 et 27 ans, Pauline et Florent ont tout compris à l'art de tisser d'impeccables ritournelles, d'assembler couplets qui rebondissent et refrains qui font mouche. Ces deux-là se sont rencontrés sur les bancs d’une école aixoise : sept ans plus tard, ils posent avec ce premier album Fingers Crossed les bases de mélodies très personnelles, ludiques et toujours saillantes.
Ils ne se seraient pas vu opérer autrement qu’en duo. A les entendre, la formule a quelque chose de magique : « C’est un format évident qui nous a toujours fascinés, expliquent-ils. Pour nous, la musique, ça se fait à deux, même s’il y a un groupe autour. » Sur ce Fingers Crossed écrit à quatre mains, ils redéfinissent la nature même du travail en binôme : plutôt que de jouer la carte du dialogue entre deux points de vue, masculin et féminin, ils y avancent de concert, main dans la main. Entre alchimie et immédiateté, leurs sensibilités sont complémentaires, l'accord de leurs voix constant... Un délicat équilibre qui fait toute la différence, et qui transparaissait déjà à l'époque où ils testaient leur écriture au gré de nombreux concerts dans les bars et tremplins parisiens.
Autodidactes complets, Florent et Pauline ont un rapport intuitif aux harmonies. De leurs pop songs franches et directes, ils ont un fait un canevas sur lequel broder leur ressenti. « Ce sont des petits pansements à l’âme, concèdent-ils en choeur. Nos textes parlent d’amour, de blessures, de nos espoirs, de nos peurs… tous ces sujets profonds qui comptent, et qu’on essaye d’exprimer avec des mots simples – à commencer par notre amitié, très forte, mais aussi parfois conflictuelle. » A l’instar des formations qui les fascinent, des Libertines à Oasis, leur amitié aura connu des hauts et des bas, ses pics et ses débats. De cette relation aussi intime qu’à une époque houleuse, ils ont tiré leur nom de scène : Part-Time Friends, « parce que par moments, on ne peut pas faire autrement que de s’écharper, même si au final, le groupe prend le pas sur tout. » Au chapitre de leurs artistes de chevet, ils citent aussi The Smiths, Girls, Bill Ryder Jones ou les Arctic Monkeys de la B.O. de Submarine, dont on savourera la divine influence sur Home, leur premier single extrait de Fingers Crossed. Dans le respect d’une tradition british en diable, ce premier opus a été enregistré au Pays de Galles, à Monmouth.
Outre les deux studios d’enregistrement dont elle peut s’enorgueillir (dont le célèbre MonoValley, où sévirent en leur temps Pink Floyd, The Coral, les frères Gallagher, et où nos deux Français ont aussi enregistré), la ville compte désormais celui du tout jeune producteur Tom Manning (ancien assistant de Rob Ellis, le batteur et producteur de PJ Harvey), aux manettes de cet album : avec lui, l’entente a été aussi fructueuse qu’immédiate. Mis en boîte en cinq semaines, Fingers Crossed a en outre profité des arrangements de Ben Christophers (lequel, au-delà de ses propres albums solo, permit à Bat for Lashes d’atteindre le succès qu’on sait). Autour de ce noyau dur, le bassiste britannique Will Taylor et l’ami de longue date et multi-instrumentiste Clément Doumic (Feu! Chatterton) ont permis de transformer le pari que représentaient ces sessions en un joyeux terrain d’expérimentation.