On l’aura compris, c’est un disque personnel pour Jewly, mais ses thèmes sont universels et nous concernent tous... Qui n’a pas croisé un jour un pervers narcissique ?
Passé le premier morceau, My Dear, qui présente l’état de fait ayant permis à Jewly de dérouler sa pelote narrative, l’album retrace de façon chronologique plusieurs phases de la vie, de 4 à 37 ans où la toxicité se manifeste sous différentes formes.
Jewly n’est pas née dans la culture rock, mais a suivi une formation d’altiste et violoniste. Après avoir d’abord chanté en cachette, vers 23 ans elle fait des concerts de jazz en mode piano-voix. Puis une envie furieuse de rock s’impose à elle, résultat de l’électrochoc provoqué par l’écoute de “Summertime” repris par Janis Joplin. Jewly le comprend à cet instant : être chanteuse, c’est ça, c’est viscéral, c’est à fleur de peau, c’est avant tout une affaire d’émotions fortes.
Jewly est née et célèbre cette arrivée au monde en sortant un EP de six titres, No Shoes, en 2011. Au fil des concerts, on lui propose une tournée aux Etats-Unis. Les retours là-bas la poussent à enregistrer son premier album. Bang Bang Bang sort en 2014, suivi d’une cent cinquantaine de dates.
L’album suivant, Drugstore (2017), est enregistré en Angleterre, dans le studio des Stranglers, avec leur ingénieur du son. A l’issue de la tournée de plus de 200 dates, dont des premières parties pour Macy Gray, Scorpions, Lucky Peterson, Yarol Poupaud et No One Is Innocent, entre autres, la Laiterie, LA salle rock de Strasbourg, l’invite à jouer en première partie des Stranglers. Une boucle symbolique se boucle, avant l’étape suivante...
Pour son troisième album, Toxic (qu’elle écrit et compose seule), Jewly réalise, comme toujours, un casting d’arrangeurs et envoie trois chansons à plusieurs candidats en leur demandant d’arranger celle de leur choix. Lorsqu’elle échange avec un certain Moon Pilot (c’est un pseudo...), elle réalise qu’il finit ses phrases, mais qu’il est également capable de la faire sortir de sa zone de confort. Ça tombe bien, c’est ce qu’elle recherche. Musicalement et humainement, la symbiose opère. Elle lui confie la double casquette d’arrangeur et réalisateur et le rejoint à Angers pour travailler avec lui sur les arrangements. En studio, Jewly découvre une nouvelle équipe et invite une vieille connaissance, le bassiste Phil Spalding (Mick Jagger, Robbie William, Mike Oldfield, etc.) qui a co-réalisé son album précédent et joué sur le premier. Invité sur trois titres, il laisse finalement sa marque sur sept. Ce n’est pas le seul invité sur Toxic : Jewly a envie d’ajouter une touche de blues à son cocktail de rock et d’électro.
Le guitariste Justin Adams (Robert Plant) est présent sur I Just Need To, Axel Bauer joue un solo sur The Stupid Game Of et Pascal Danaë, chanteur-guitariste de Delgres, groupe de blues caribéen, vient avec son dobro sur “Toxicity”.
Et pour accompagner un album narratif, Jewly se lance un ultime défi : réaliser un clip par chanson et tourner le tout en 24 heures. Ce sera le road-trip de la protagoniste lui permettant de s’immerger dans ses émotions. Un challenge qui aurait pu mal finir. Le tournage a débuté en soirée, avec Jewly au volant d’une vieille Alfa. Au petit matin, elle et l’équipe sont dans un coin perdu, quand une Mercedes à vitres teintées se gare derrière eux et coupe ses phares. Les réalisateurs décident de filer sans demander leur reste, s’engouffrent dans une voie sans issue, Jewly démarre, suivie par la Mercedes qui finit par la lâcher. Ils comprennent alors qu’il s’agit sans doute d’un mac voulant les chasser de son territoire... Voilà pour la note finale de toxicité.
Jewly reconnaît qu’elle se fixe inconsciemment des contraintes pour dépasser ses limites, évoluer d’un album à l’autre, sans se départir de son authenticité. Après l’accueil favorable reçu par Drugstore, elle savait qu’elle devrait frapper fort pour faire encore mieux. Et c’est justement ce qu’elle a accompli avec Toxic.