Pouvez-vous nous présenter votre album Quelque part entre la guerre et la lâcheté et les thèmes que vous avez souhaité aborder ?
Il s’agit de notre tout premier album. Neuf chansons pour 45 minutes environ de musique. Musicalement, on a toujours été attiré par plein de choses, mais majoritairement le métal et le rock au sens large (de King Crimson à Napalm Death, en passant par Massive Attack, Sonic Youth et Jacques Brel) et c’est ce qu’on a voulu faire refléter dans ce premier disque. Une musique résolument métal, mais qui tire ses inspirations d’ailleurs. D’où le fait qu’il y ait beaucoup de passages très ambiants ou mélodiques, malgré cet aspect bruitiste pour ponctuer les chansons de manière brutale.
Au niveau des textes, on a voulu évoquer le fait d’être tous plus ou moins tiraillé entre deux feux. Le fait de crier au scandale sur tous les travers de notre quotidien, mais qu’on préfère tous rester assis dans notre canapé à regarder Top Chef ou Les Anges De La Télé Réalité... en « rêvant ». Combien de fois on a vécu un moment inhabituel, où, une fois rentré chez nous, on s’imagine réagir différemment de ce qu’on a fait ? Parce qu’en vrai, on a rien fait... on a juste baisser les yeux en continuant notre chemin solitaire, sans se mouiller. Être dans la droite ligne de ce que les autres veulent pour nous. Ne pas faire de vague... une certaine vision d'une société dite normale, pour le « bonheur » de tous, ou l'ennui ?
Comment composez-vous et sur quoi attachez-vous de l'importance dans vos titres ?
Il y a un compositeur principal qui va écrire la ligne directrice des morceaux, puis, avec l’aide d’une ou deux personnes on va structurer plus en détails la chanson et, seulement après, tous ensemble, on écrit les arrangements pour tout le monde. Il arrive parfois aussi qu'on trouve des choses intéressantes lors d’improvisations collectives. Mais à sept, ce genre de moment est plus compliqué à mettre en place.
Lors des compositions, on va surtout mettre l’accent sur la fluidité des enchaînements pour que cela ressemble à des chansons évidentes pour l’auditeur, et non pas à un empilement de riffs en cascade comme on peut le voir souvent dans le rock progressif. Il faut que nos morceaux aient un fil conducteur dans chacun d’eux, quelque chose qui nous guide tout du long, sans passer du coq à l'âne. Une musique étonnante, mais pas surprenante.
Peut-on en savoir plus sur la partie instrumentale et comment faites-vous avec vos différents instruments pour aboutir à ce rock ?
Quand on s’est dit qu’on allait jouer en acoustique, on a décidé de faire le truc à fond sans se mettre de barrière. Peu importe l’instrument, tant qu’il est acoustique. Un genre musical ne se défini par forcément par le son, mais aussi, ou peut-être surtout, par une façon de jouer et des mélodies que tu en sors.
Les mélodies et les rythmes, c’est important. La qualité du son, ce n’est que son habillage. Il peut être anecdotique. On a beau avoir des instruments de musique classique, on joue quand même dessus comme si c’était du punk ou du rock, à fond les ballons. Beethoven, Wagner ou Dvořák n'ont pas attendu d'avoir de la saturation sur leurs violons pour faire une musique violente. On a jamais compris pourquoi la plupart des groupes de rock ou de métal, lorsqu’ils prennent des guitares acoustiques, se mettent à jouer des ballades.
Quel a été le cheminement pour faire un album acoustique et en quoi était-ce important pour Dronte ?
C’est arrivé un peu par hasard, à dire vrai. Au départ nous étions en électrique, mais, comme les studios fermaient pour l’été, on a commencé à composer en acoustique, chez nous, avec les moyens du bord.
De retour de vacances, les chansons qui avaient été écrites sonnaient terriblement mal et on ne comprenait pas pourquoi. On a essayé de les rejouer en acoustiques pour comparer et on s’est rendu compte que ça marchait mieux en acoustique qu’en électrique. Du coup, on a gardé cette formule qui nous a beaucoup amusé.
Parlez-nous du titre Notre grande machine et de son clip...
On a voulu faire quelque chose de simple, à l’image de cette chanson, mais, qui refléterait en même temps son propos. Le texte évoque la répétition. Quelque chose de sans fin, qui, au fil du temps, nous fait comprendre que cela perd de son sens jusqu’à en devenir presque nocif, comme ce qu’on pourrait penser de l’industrialisation. Des usines qui fabriquent, encore et encore, pour toujours plus, aussi bien des choses comme des gens. Très rapidement, on a fait le rapprochement entre notre idée et le travail d’Andy Warhol sur la photocopie et on a tenté de reproduire à peu près le même concept mais en vidéo.
Comment se sont passés les enregistrements ?
Soyons honnête, très mal. Nous n’avions jamais vraiment joué en acoustique, auparavant. On a appris et découvert sur le tas toutes les contraintes de ce type d'instruments, qui n’ont en vrai rien en commun avec leur pendant électrique avec lequel nous étions habitué. C’est pourquoi nous avons carrément interrompu l’enregistrement à mi-parcours pour nous entraîner. Nous sommes revenus six mois plus tard, fort de notre expérience pour éviter de reproduire toutes nos erreurs passées. On en a même profité pour tenter quelques subtilités sonores sur les résonances de cordes, en coupant les cordes sympathiques. Bonne ou mauvaise idée... on ne sait pas, mais c’est en tout cas le résultat qui est sur le disque.
Pouvez-vous nous en dire plus sur l'artwork de Quelque part entre la guerre et la lâcheté ?
Nous souhaitions retranscrire l’ambiance et la dualité qui est présent dans les textes de l’album. Ce côté où on pense tous être meilleurs que les autres, que si on suivait nos conseils tout irait bien. Et par conséquent que si rien ne va, ce n’est pas notre faute, car « l’enfer, c’est les autres », disait-il.
Une indiscrétion ou une anecdote à nous raconter sur l'album Quelque part entre la guerre et la lâcheté ?
J’ai bien peur que nous ayons été d’une sagesse scolaire pendant la fabrication de ce disque...
Qu'est-ce qui vous a plu dans le dronte pour prendre le nom de cet oiseau ?
C’est sa thématique qui nous a touché. Le fait que cette espèce se soit éteinte par son manque de méfiance des êtres humains (ce qui risque de nous arriver aussi, vu l'état d'éveil des consciences face aux différentes alertes mondiales de tous types et le sérieux que les gens leur accorde). Étant tous de grands naïfs dans le groupe, on s’est dit qu’on finirait sûrement comme ça, nous aussi.